Billets du monde

  Les monnaies de l'Océanie

Avant l'arrivée des Occidentaux, les îles du Pacifique sud ne connaissaient pas la monnaie ou le commerce au sens où nous l'entendons, mais elles pratiquaient les paiements rituels, dont certains survivent sous forme symbolique sur les espèces monétaires de ces États.

Dans le Pacifique, l'Océanie s'étend, d'ouest en est, de l'Indonésie et des Philippines jusqu'à l'île Pitcairn. Elle se compose aujourd'hui des États de Belan, des États fédérés de Micronésie, du Commonwealth des Mariannes du Nord, des îles Salomon, du Territoire des îles de la mer de Corail, de Vanuatu. de la Nouvelle-Calédonie, des îles Fidji, de Wallis-et-Futuna, de Tuvalu, de Kiribati, des îles Marshall, de Tokelau, de Niue, des îles Cook, des Tonga, des Samoa et des Samoa américaines, de la Polynésie française et de Pitcairn. Cela représente une superficie de l'ordre de 5 000 km d'ouest en est et de 2000 km du nord au sud. Rien d'étonnant à ce qu'on y rencontre une grande variété de monnaies.

 

MONNAIE PRIMITIVE

Ces différences ne se limitent pas, comme c'est le cas en Europe occidentale, aux noms des devises. L'Océanie s'est révélée l'une des régions les plus riches en matière de monnaies dites «primitives ». Ici, les monnaies ont revêtu diverses formes, des coquillages aux peaux, des tissus aux coraux et des pattes de scarabée aux épines dorsales de lézard. Mais le problème vient de l'absence de traces évidentes de l'usage de ces monnaies avant l'arrivée des Occidentaux. Les premiers observateurs occidentaux, arrivés avec les marchands, ont trouvé sur place des systèmes monétaires qui subissaient déjà l'influence de ce commerce. En outre, ces observateurs étaient enclins à appliquer leurs propres modèles et préjugés à ce qu'ils voyaient en Océanie, sans se rendre compte que la fonction de la monnaie pouvait y être différente de celle qui leur était familière. Ce problème est illustré par le fait qu'en Polynésie et dans les îles Fidji, la monnaie n'existait pas. Dans ces paradis terrestres, on trouvait tout en abondance. Le commerce était inutile et l'absence de monnaie était une caractéristique de cette société. Si la monnaie est apparue dans certaines régions de l'Océanie, c'est peut-être autant pour des raisons sociales qu'économiques.L'arrivéeL'arrivée
La dimension sociale de la monnaie permet de comprendre la gamme surprenante, en apparence, d'objets utilisés comme instruments d'échange. Un exemple est fourni par les «monnaies-plumes» des îles Santa Cruz. Ressemblant à des ceintures de forme complexe et mesurant environ 10 m de long, elles sont faites de plumes de colombe auxquelles sont attachées les plumes rouges les plus délicates de quatre cents à six cents passereaux colorés. Celles-ci sont collées et fixées sur un rouleau de fibres dont la longueur peut atteindre 70 m. Des dents de cochon et des pierres peuvent y être également fixées. Il fallait parfois jusqu'à une année entière pour élaborer un tel objet. Il est donc évident que ce genre de monnaies ne pouvait pas remplir la même fonction qu'un billet de 1 dollar.
Il s'agissait davantage d'un symbole ostentatoire du statut social, représentant une valeur de prestige plutôt qu'une valeur économique. Les habitants des îles Santa Cruz utilisaient ces «monnaies-plumes» lors de transactions particulières : cérémonies de mariage où l'on achetait une bonne épouse ou acquisition d'un canoë de haute mer. Plus les plumes étaient colorées, plus le rouleau avait de valeur.

 

CertainesCOQUILLAGES

Cela vaut aussi pour les «monnaies-coquillages», qui consistaient en une présentation élaborée d'un type particulier de coquillages, les cauris. De la Micronésie jusqu'en Papouasie-Nouvelle-Guinée, la forme principale donnée était des chapelets de sapi-sapi, des fragments de coquillages enfilés sur un cordon. D'autres, dans lesquels on avait percé deux trous, étaient enfilés sur deux tiges parallèles. Intéressante aussi, la «monnaie-cochon» de Nouvelle-Irlande, ensemble de chapelets de coquillages ronds enfilés bout à bout parfois sur une longueur de 2 m. Une unité de cette «monnaie-cochon» pouvait contenir jusqu'à dix-sept de ces chapelets, assimilés symboliquement à des queues de cochon. En dépit de leur aspect très diversifié, toutes ces «monnaies-coquillages» avaient une fonction sociale proche - elles servaient de dots ou d'offrandes propitiatoires. Cela témoigne de la portée symbolique de ces objets pour les insulaires du Pacifique. Le symbolisme de la queue de cochon n'est pas aussi bizarre qu'il y paraît. Les porcs mâles étaient des animaux très appréciés tant sur les plans religieux et social qu'alimentaire. La valeur d'un porc dépendait de ses dents - plus elles étaient recourbées, mieux c'était - et de son potentiel en tant qu'animal de sacrifice. Les dents étaient aussi employées pour les dots, les amendes ou pour payer les chamans.
N'importe quel objet auquel étaient attribuées des vertus magiques, ou dont l'aspect semblait étrange, pouvait servir de moyen de paiement. Comme les pattes bleues et brillantes du bupreste, un coléoptère, enfilées bout à bout sur des fibres rigides ou de la ficelle, en usage dans les îles Saint-Matthias. Les dents de toutes sortes d'animaux ont servi de moyen d'échange. A San Cristôbal, des dents de marsouins et de vertébrés marins étaient enfilées en colliers pour servir dans des cérémonies propitiatoires. En Nouvelle-Calédonie, des miu bwarre (ou monnaies noires), colliers faits de petits morceaux d'épine dorsale de lézard et, par la suite, de minuscules pointes des coquilles de conus, étaient encore utilisés dans les années vingt pour faire des offrandes à des personnalités importantes et pour payer les amendes, plutôt que pour le commerce. Au début du XXe siècle, un poulet valait 2 m de pattes de scarabées. Une longueur comparable de coquillages permettait d'acheter deux gros poulets, 2 m de calicot, une petite hache ou une pelle.

 

DU NEUF AVEC DU VIEUX

Si, avec les marchands européens, apparurent les pièces de monnaie et les billets, certains États ont lutté pour maintenir des liens avec leur passé. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, le nom de kina, un coquillage qui servit d'instrument d'échange, fut donné à la monnaie nationale, émise à compter de l'indépendance, en 1975. Le billet de 5 kinas émis cette année-là porte une image de ce coquillage au revers.

 

PRÉSERVER LA MÉMOIRE

Toujours en Papouasie-Nouvelle-Guinée, des billets sont ornés d'objets ayant été utilisés comme moyen d'échange : celui de 10 kinas montre des anneaux et celui de 20 kinas, la tête d'un sanglier. Sur la coupure de 100 vatus de l'archipel du Vanuatu, la représentation stylisée d'une dent de sanglier recourbée fait partie intégrante du dessin au premier plan duquel figure un guerrier debout. Le billet de 10 dollars des îles Salomon, émis en 1977, évoque le procédé actuel de fabrication des «monnaies-coquillages» locales, de même que le produit fini. Les monnaies traditionnelles de l'Océanie n'auront été préservées que dans ces illustrations et dans les musées.

 

(c) Éditions Atlas -textes et illustrations (hors billets)




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